La France vient de marquer un coup d’arrêt dans la course mondiale à la fusion nucléaire : le tokamak WEST à Cadarache a maintenu un plasma stable pendant 1 337 secondes — soit plus de 22 minutes — et a ainsi signé un record mondial qui dépasse la précédente référence chinoise. Ce résultat n’est pas un feu de paille : il repose sur des décennies d’expérience accumulée depuis Tore Supra, sur des bobines supraconductrices performantes et sur l’usage systématique du tungstène pour protéger les parois. Concrètement, cette performance donne des données opérationnelles précieuses pour ITER et pour la conception des réacteurs de demain, en particulier sur la tenue des matériaux et la maîtrise du plasma. Au-delà de la prouesse scientifique, il y a un enjeu stratégique : la technologie de la fusion, si elle arrive à maturité, offrirait une énergie propre et durable, un atout pour lutter contre le réchauffement climatique et renforcer la souveraineté énergétique de la France face à des rivaux comme la Chine.
- Record mondial : 1 337 secondes de plasma maintenu à WEST (février 2025).
- Amélioration : environ +25 % par rapport au record de l’EAST en Chine (1 056 s en 2021).
- Valeur scientifique : validation des matériaux (tungstène), contrôle des instabilités et données pour ITER.
- Enjeux : vers une énergie propre, mais toujours loin du seuil d’ignition et des centrales commerciales.
- Contexte : compétition technologique et implications industrielles pour la France et l’Europe.
Fusion nucléaire : la France dépasse la Chine avec un record mondial à Cadarache
Le 12 février 2025, l’équipe du CEA au tokamak WEST a réussi un exploit technique : maintenir un plasma pendant 1 337 secondes. Pour donner du sens, revenons sur la trajectoire : en 2003, Tore Supra avait posé la première pierre avec 390 secondes ; la Chine, avec EAST, avait franchi la barre des 1 000 secondes en 2021.
Ce nouveau palier — améliorant la durée d’environ 25 % — est surtout précieux pour l’industrialisation future. Les mesures prises sur la tenue du tungstène, le comportement des bobines supraconductrices et la stabilité des champs magnétiques sont des données concrètes qu’ITER et d’autres projets pourront exploiter.

Ce que cela change techniquement
Stabiliser un plasma des minutes durant, ce n’est pas juste une statistique : c’est la preuve que l’on peut contrôler certaines instabilités sur des échelles de temps pertinentes pour une exploitation industrielle. Les équipes ont travaillé sur le chauffage, la gestion des flux de particules vers les parois, et sur les systèmes de contrôle en temps réel.
Rappel rapide : la fusion implique des températures de l’ordre de dizaines à centaines de millions de degrés selon la configuration et le combustible. L’objectif ultime reste le seuil d’ignition, où la réaction devient autosuffisante ; WEST ne l’a pas atteint, mais il produit des enseignements critiques sur la tenue des composants.
Pourquoi WEST est essentiel pour ITER et l’industrie de la fusion
Le succès de WEST s’inscrit dans une logique de chaîne d’apprentissage. ITER, construit à proximité et porté par 35 pays, vise à démontrer la production d’énergie par fusion à plus grande échelle. Les petits pas réalisés à WEST — tenue du plasma, gestion thermique, comportement du tungstène — réduisent l’incertitude technique pour ITER.
En pratique, les équipes d’ingénieurs, à l’image fictive de Sophie, ingénieure en diagnostics plasma au CEA, passent de longues nuits à comparer signaux, à corréler usure matérielle et profils de température. Ces retours « du réel » sont inestimables pour dimensionner les futures chambres à vide et les systèmes de refroidissement.

Matériaux, bobines supraconductrices et techniques de contrôle
WEST se distingue par l’emploi de bobines supraconductrices capables de générer des champs magnétiques intenses et stables. Le choix du tungstène pour les parties exposées au plasma vient de sa résistance à l’érosion et à la chaleur extrême.
Ces avancées matérielles sont couplées à des algorithmes de contrôle et à des diagnostics avancés : capteurs rapides, boucles de rétroaction et stratégies de mitigation des disruptions. Tout cela forme un socle technologique que l’on peut qualifier de véritable innovation pour la filière.

Enjeux stratégiques : énergie propre, industrie et réchauffement climatique
Au-delà de la prouesse scientifique, la question stratégique revient : que fait-on de la fusion nucléaire si elle devient viable ? Pour la France, c’est une opportunité de leader industriel, d’attraction d’industries intensives en énergie et d’indépendance face aux cycles géopolitiques de ressources.
La fusion promet une énergie propre et abondante, sans émissions directes de CO2. Dans un monde où la demande énergétique explose — entre centres de données, intelligence artificielle et industries nouvelles —, cette source pourrait réduire la pression sur les solutions fossiles et limiter le réchauffement climatique.

Les obstacles encore à franchir
La liste des défis reste longue : atteindre l’ignition, améliorer le rendement énergétique global, réduire les coûts d’investissement et assurer la durabilité des matériaux. Techniquement, il faudra aussi résoudre la gestion des flux d’énergie et la maintenance des composants irradiés.
Concrètement, voici ce qui reste à faire :
- Augmenter le temps et la qualité du confinement du plasma jusqu’à l’ignition.
- Optimiser les systèmes de chauffage et les bobines supraconductrices pour une efficacité maximale.
- Développer des matériaux résistants aux cycles thermiques et à l’irradiation (au-delà du tungstène).
- Rendre les coûts d’exploitation et de construction compatibles avec un déploiement industriel.
- Mettre en place des chaînes industrielles et une gouvernance internationale pour la sécurité et la réactivité.
Ces points montrent que, même si WEST rapproche la science de la pratique, la route vers des réacteurs nucléaires à fusion commerciaux reste jalonnée d’étapes techniques et économiques.
Culture, communication et perception publique : science, cinéma et vigilance
La communication autour de la fusion doit rester responsable. Il est tentant d’utiliser des images spectaculaires — parfois proches d’un film d’espionnage —, mais il faut expliquer les limites et les échéances concrètes.
Sur le plan pédagogique, relier la fusion au fonctionnement du Soleil aide le public à se repérer. Des ressources d’explication comme explication physique du Soleil clarifient les analogies, tandis qu’un bon système de gestion des risques et des alertes techniques est indispensable pour les installations réelles : voir par exemple les principes d’un système d’alerte.
Enfin, pour ceux qui veulent approfondir la comparaison solaire et les réactions nucléaires, on peut consulter des fiches pédagogiques et des Q&A comme questions sur le Soleil, utiles pour replacer la fusion dans un cadre accessible.
Insight : la fusion captive l’imaginaire, mais elle exige une pédagogie rigoureuse et des instruments de sécurité robustes.
Liste des implications pour les décideurs
- Investir dans la recherche fondamentale et l’industrialisation des matériaux.
- Soutenir la formation d’ingénieurs spécialisés en plasma et cryogénie.
- Mettre en place des mécanismes publics-privés pour accélérer le transfert technologique.
- Assurer une communication transparente pour éviter promesses irréalistes.
- Intégrer la fusion dans une stratégie énergétique complète, complémentaire aux renouvelables.

Qu’est-ce que signifie concrètement le record de 1 337 secondes ?
Il s’agit du temps pendant lequel WEST a maintenu un plasma stable et contrôlé. Ce record n’indique pas que la fusion produit de l’énergie nette (ignition), mais il fournit des mesures opérationnelles précieuses sur la tenue des matériaux, la gestion thermique et les boucles de contrôle, qui sont essentielles pour la conception d’ITER et des réacteurs futurs.
En quoi ce record aide-t-il ITER ?
Les données expérimentales issues de WEST permettent d’ajuster les modèles, de valider des composants (comme les revêtements en tungstène) et d’améliorer les procédures de contrôle des instabilités. ITER bénéficiera directement de ces retours pour dimensionner ses systèmes et réduire les risques techniques.
La fusion va-t-elle remplacer la fission et les énergies fossiles demain ?
Pas immédiatement. La fusion reste prometteuse pour fournir une énergie propre à long terme, mais des défis techniques et économiques subsistent. Il faudra encore plusieurs années — voire décennies — pour atteindre une maturité industrielle. Entre-temps, la fission moderne, les renouvelables et l’efficacité énergétique restent essentiels pour la transition.
Quel rôle pour la France et l’Europe dans cette course technologique ?
La France, grâce à des installations comme WEST et à la proximité d’ITER, est bien placée pour jouer un rôle central. L’Europe peut tirer avantage de cette position pour développer une filière industrielle de pointe, former des talents et attirer des investissements, consolidant ainsi sa souveraineté énergétique.

